29 octobre 2017
Plus que deux mois avant la fin des tarifs sociaux de l’énergie
Décidée par la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) du 17 août 2015, la fin des « tarifs sociaux » de l’énergie (Tarif de Première Nécessité ou TPN pour l’électricité et Tarif Spécial de Solidarité ou TSS pour le gaz naturel) est programmée pour le 1er janvier 2018. A partir de cette date, ils seront définitivement remplacés par le chèque énergie, qui n’a été expérimenté que depuis 2016 dans quatre départements français (Ardèche, Aveyron, Côtes-d’Armor et Pas-de-Calais). Alors que la généralisation du dispositif avait été annoncée avant même la fin de l’expérimentation, la transition entre les « tarifs sociaux » et le chèque énergie s’annonce désordonnée et tumultueuse.
La LTECV prévoit qu’un rapport d’évaluation de l’expérimentation du chèque énergie soit remis au Parlement trois mois avant la fin de cette expérimentation, soit au plus tard le 1er octobre 2017. Ce rapport, encore en cours de finalisation, devrait être remis avec environ un mois de retard. Si la version intermédiaire du rapport apporte déjà un éclairage intéressant sur les résultats chiffrés de l’expérimentation, sa portée est néanmoins fortement amoindrie : il est de toute façon trop tard pour modifier le calendrier de fin des tarifs sociaux et de généralisation du chèque énergie ! Les seules actions possibles sont désormais de tout faire pour améliorer l’efficacité du chèque énergie, en parallèle de son déploiement (ou conjointement à).
Une bonne appropriation du dispositif, mais des risques d’incompréhension au démarrage
Distribué à tous les ménages éligibles, sans démarche nécessaire de leur part, le chèque énergie est globalement simple de compréhension et d’utilisation. Il a été effectivement utilisé par près de 80% des ménages qui l’ont reçu dans les 4 départements tests, ce qui en fait un des dispositifs d’aide sociale se rapprochant le plus de ses objectifs, au même niveau environ que les tarifs sociaux de l’énergie.
Pour autant, peut-on se contenter de ce résultat ? Plus d’un ménage sur cinq recevant le chèque ne s’en sert pas, ce qui doit interpeller. Il est urgent de mieux informer les bénéficiaires, mais aussi les travailleurs sociaux qui peuvent être leurs interlocuteurs. D’autant que, si le taux d’usage est in fine relativement bon, la phase de démarrage est particulièrement critique, en particulier pour les ménages bénéficiant antérieurement des tarifs sociaux. En effet, pour tous ceux-ci, leur facture d’énergie va augmenter pendant plusieurs mois, sans qu’ils y soient préparés, le chèque énergie ne leur étant envoyé qu’en avril ou mai. De plus, certains ménages aujourd’hui éligibles aux tarifs sociaux ne seront en réalité plus éligibles à aucune aide car les critères d’attribution évoluent. Pire, ces ménages ne le savent probablement pas encore, à moins qu’ils n’aient essayé le simulateur du ministère, autour duquel la communication n’a pas été à la hauteur de l’enjeu.
Ces difficultés identifiées, conjuguées à l’effet volume du démarrage simultané pour 3 millions de ménages sur toute la France, risquent de générer un retard dans la capacité de traitement des chèques et conduire à l’engorgement des centres d’appels, générant par là-même encore plus de mécontentement.
Des coûts de gestion encore très importants
L’UFE a d’ailleurs suggéré, parmi d’autres propositions pour limiter les risques de dysfonctionnements et de surcoûts, d’étaler sur deux mois l’envoi des chèques énergie afin de limiter l’afflux de cas particuliers à gérer. Car les coûts sont aujourd’hui le grand inconvénient du chèque énergie. Le rapport 2016 de la Cour des Comptes estimait à plus de 10% les coûts de gestion du chèque énergie rapporté au montant d’aides attribué, contre moins de 4% pour les tarifs sociaux. Et cela bien que le montant moyen du chèque ait été augmenté par rapport aux tarifs. Il serait d’ailleurs souhaitable que le montant soit encore augmenté, car il est pour l’instant loin de constituer une réponse au problème de la précarité énergétique. Cela aurait par ailleurs mécaniquement pour effet de diminuer le ratio des coûts de gestion. Mais il y a encore beaucoup à faire pour baisser le coût unitaire du traitement de chaque chèque, en particulier en ayant recours de façon accrue à la dématérialisation et l’automatisation des différentes démarches.
Les droits associés, une protection d’autant plus efficace si elle est mise en place a priori
Comme les bénéficiaires des tarifs sociaux, les bénéficiaires du chèque énergie peuvent faire valoir les droits « associés » ou « connexes » à la réduction de facture, par exemple le maintien de la puissance électrique en période hivernale même en cas d’impayés ou des délais rallongés avant toute éventuelle coupure. Ces droits sont autant de protections pour les consommateurs concernés, que les fournisseurs prévoyaient automatiquement en même temps que l’attribution des tarifs. Avec le chèque, ce sont aux ménages d’effectuer une démarche active auprès de leur fournisseur pour se signaler comme clients devant bénéficier des droits connexes. Beaucoup de consommateurs peuvent ne voir l’intérêt de ces droits associés qu’a posteriori, dans la situation d’un incident particulier, ce qui en réduit considérablement la portée et la facilité d’application. L’UFE recommande donc de revenir à un système d’identification a priori des ménages devant bénéficier de ces droits.
Aussi longtemps qu’il y aura de la précarité économique en France, il y aura de la précarité énergétique et donc, besoin d’y répondre pour aider les ménages à faire face à cette dépense essentielle qu’est l’énergie.
La précarité énergétique a des conséquences sanitaires et sociales majeures. Il est donc indispensable que les aides mises en place soient les plus efficaces possibles, en profitant de l’expérience accumulée collectivement. Il n’y a plus lieu d’opposer tarifs sociaux et chèque énergie, puisque la fin des uns et la généralisation de l’autre sont actées. Mais il est crucial de s’appuyer sur les bonnes pratiques et les pistes d’amélioration connues des tarifs qui, pour certaines, ont déjà bénéficié au chèque énergie, afin de faire de ce nouvel outil un soutien le plus utile possible à ceux qui en ont besoin.
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